Frelons ensemble !

Sonatura qui tente de sensibiliser à l’écologie par le son met à l’honneur les beautés sonores des solistes ou des ambiances de la nature mais ne manque jamais une occasion de démontrer que la richesse de la nature se niche aussi au fond du jardin. L’un des défis de demain en matière de biodiversité est la prise en compte du réchauffement climatique et notamment de l’expansion des espèces invasives. Le Frelon asiatique qui s’est installé dans les années 2000 en France par le Sud a maintenant atteint la région parisienne. En Beauce où j’ai signalé un nid en 2015, il a occupé la sous-pente de ma toiture il y a quelques semaines. J’ai dû intervenir. Néanmoins, son installation dans la région est irrémédiable et c’est en observant le manège des frelons d’Europe sur mes pommiers que je viens de constater sa présence encore sporadique. Survivant de la désinsectisation ? J’en profite pour observer sa cohabitation avec les frelons d’Europe. Ceux-ci viennent d’un jardin voisin pour boire la sève sucrée qui coule d’une fente de l’écorce.

Par moments, apparaît le cousin asiatique, l’occasion de photographier la scène : le frelon européen, un peu plus gros, chasse l’intrus presque toujours mais sans véhémence.

La place est prise et même ses congénères européens sont refoulés. Ceux-ci suscitent cependant rarement la réaction égoïste alors que l’approche de l’intrus provoque presque toujours une vive réaction « réflexe » typique : ouverture et vibration des ailes et posture de défense agressive, pattes antérieurs étendues et levées (que nous aurions nous, humains, pu adopter au contraire pour signifier « Dans mes bras ! » – mais nous ne sommes pas frelons !). Comment expliquer que même la tête engagée dans la faille de bois et concentré sur son appétissant apéritif, l’individu en place réagisse si prestement à l’approche du frelon asiatique ? Je soupçonne une différence acoustique dans leurs bourdonnements et j’installe un micro MS à 10 cm. Surprise : une écoute attentive révèle que le Frelon asiatique quoique plus petit, produit un fredonnement plus grave (du moins, que ces ouvrières ; devant une reine, la comparaison serait sans doute différente). S’agît-il d’une question de vitesse de battement à moindre fréquence ?

Je constate que bien souvent dérangé, nos frelons européens tolèrent parfois la présence de l’étranger mais alors s’instaure une distance minimale vitale de cohabitation : à portée de patte, le cousin asiatique se fait rabrouer. Sur un peu plus d’une heure d’observation, j’aurai pu constater combien l’intrus aura dérangé et entrecoupé le paisible manège des frelons européens. Le pauvre immigré quant à lui aura eu peu de répit et aura moins profité de la source de sucres. Bref, en un mot, pour cet exemple vécu, malgré des chamailleries fréquentes, la cohabitation s’est avérée possible, sans agressivité violente mais la niche écologique des deux espèces ne semble pas s’être séparée. Qu’adviendra-t-il de cette évolution dans les années à venir dans ce contexte de réchauffement global où l’homme ne laisse guère le temps aux espèces de s’adapter ?

Description de la scène (avec quelques coupures et re-montage sur des passages ‘vides’ ou peu significatifs mais sans modification des évènements) : Des mouches s’affairent sur la source de sève… Un frelon européen arrive, tourne, se pose et repart [Tourterelle turque atterrissant]… Un frelon asiatique arrive [mouches], boit et repart [moineaux]… Un frelon européen arrive avec un frelon asiatique et ensemble, se disputent la source. Comme toujours, l’européen l’emporte, profitant de sa taille plus imposante…. L’asiatique revient… Bataille [un ara en cage au loin]… L’asiatique revient à la charge : bataille puis cohabitation [moineau]…Un autre européen arrive ; l’asiatique s’agite [Pic épeiche] et Fin.

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