Tourbière en avril

   Hautes Vosges (environs de La Bresse)

  Le printemps approche, lentement, sur les hauteurs des Vosges. Les dernières neiges recouvrent timidement les chaumes alors que les lacs et tourbières, visités par le vent tiède du sud-ouest, se délivrent doucement de la glace.
L’élévation de la température ambiante et le changement de luminosité déclenchent le réveil des batraciens après de nombreux mois de repos hivernal.

00’00’’ à 01’50’’ : fonte des neiges en sous-bois. Un vent chargé d’humidité balaye la cime des épicéas et des hêtres.
01’50’’ à 05’00’’ : des Grenouilles rousses (Rana temporaria) se sont regroupées par milliers dans la partie la plus chaude d’un lac tourbière, exposée plein sud. Plus à l’est, l’eau est encore complètement gelée.
Le plus souvent émis sous l’eau, le murmure des mâles est difficile à localiser, si bien que ce sont surtout les signaux vibratoires qui permettent aux femelles de trouver leurs partenaires. Mais l’effet de nombre crée une sorte de ronronnement assez puissant, audible parfois à plus de cent mètres.
À noter que la résistance de ces animaux à l’acidité est importante : des pontes sont observées dans des tourbières où le pH est voisin de 4…
En installant mes micros je me suis aperçu, non sans un profond agacement, que des braconniers avaient déposé plusieurs nasses le long des berges. Malgré la protection dont jouissent les batraciens, le braconnage des « pattes de grenouilles » pendant la période de reproduction reste un facteur important du déclin de ces animaux dans certaines régions.*
05’00’’ à 06’52’’ : quelques jours plus tard, dans la même tourbière, le Crapaud commun (Bufo bufo) a rejoint son site de ponte.
Cet amphibien, tout comme la Grenouille rousse, émet des cris discrets qui ne sont perceptibles qu’à quelques dizaines de mètres : il gonfle simplement sa gorge pour chanter et n’a pas de réel sac vocal. Certains de ces sons peuvent faire penser aux sifflements de Rallidés, tels que la Poule d’eau (Gallinula chloropus) ou la Foulque macroule (Fulica atra).
On peut distinguer dans cet enregistrement le chant d’amour et des cris exprimant un certain agacement ou une attitude de défense (sons plus aigus pouvant être émis par des individus des deux sexes).

* Devant une telle situation, il ne faut pas hésiter à faire appel aux services départementaux de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage.

       Marc NAMBLARD

Ce contenu a été publié dans N° 4. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *